Gérald Engelvin
1972, Versailles (France)
Oeuvre ...
Gérald Engelvin, peintre de l’intérieur
"Là tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté… disait Baudelaire. Et c’est ce vers qui vient immédiatement à la bouche lorsque l’on regarde les toiles de Gérald Engelvin, d’où émane une véritable sérénité. On ne peut pas passer à côté sans s’arrêter un moment, elles suspendent notre course et nous mettent spontanément en rêverie. Nous sommes saisis par la beauté, tout en restant libres. Il y a quelque chose de familier dans l’histoire que l’on commence à se raconter. Nous sommes comme invités chez nous, un lieu nous attendait donc. Et nous pouvons rester longtemps sans rien dire devant les tableaux de Gérald Engelvin, le temps nécessaire pour que cette jeune fille allongée sur la banquette finisse son livre, le temps nécessaire pour que cette autre finisse son rêve. Un temps infini donc.
Quand on parle de peinture, on reste toujours fasciné par les deux dimensions, le fait d’y convoquer un monde. Rien n’est trompe-l’œil chez Gérald Engelvin, tout est ordonnancement. Il propose un mur qui devient notre maison, notre intérieur, notre for-intérieur. Les masses de peintures s’organisent et nous laissent intrigués à perpétuité devant l’immuable. L’équilibre tient de l’harmonie. La grâce tient à une infime touche de déséquilibre qui nous met en questionnement : le froissé d’une robe, un léger mouvement, l’expression d’un visage concentré ou en attente, l’inclination des têtes, l’origine d’une lumière rampante, l’enchaînement des pièces… Parfois la mise en situation va jusqu’à poser une énigme. Cette énigme ne se résout qu’en abdiquant devant la poésie et la grâce.
A contempler ces intérieurs habités par l’enfance, on ressent malgré tout une certaine gravité en deçà de l’harmonie. Derrière l’invitation familière qui nous est faite à habiter les tableaux, on semble lire que ce qui nous est ainsi proposé ne va peut-être pas durer. Pire, ce temps est peut-être déjà passé… La nostalgie est anticipée et incorporée à la sérénité présente. Ce moment d’éternité ne durera pas. On n’y tient que davantage et notre souffle contient tout l’attachement à la vie, on aime. Les enfants solitaires, sages, rêveurs, les enfants dans leur monde, … semblent nous rappeler que l’âge adulte est un leurre. Nous pouvons y échapper en étant présents à l’intérieur de nos êtres. C’est ainsi que les intérieurs peints par Gérald Engelvin s’impriment en nous."
Maximilien Friche